Février 2022
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Editorial
Equilibre. Equilibre entre passéisme, actualités, généralités, politique ou humour. Même un modeste blog comme « ruedespuces » n'échappe pas au risque de privilégier un ou plusieurs thèmes par rapport à d'autres. Lorsqu'on a pour ambition de traiter de sujets relatifs à un territoire, susceptibles d'intéresser une majorité d'actuels ou d'anciens habitants il est tentant de parler du passé, les anciens aiment bien se souvenir du bon temps de leur jeunesse où il faisait toujours beau. Trouver des sujets d'actualité concernant la vie locale n'est pas chose facile et comporte le risque de critiquer, de prendre position et d'être ainsi classés comme un organe d'opposition à la politique communale ou intercommunautaire. Les articles traitant de sujets d'intérêt général réservés plutôt aux médias régionaux ou nationaux peuvent ne pas entrer dans le cadre d'un blog en principe destiné à des lecteurs qui attendent des articles concernant des sujets locaux, néanmoins, il est parfois intéressant de connaître l'avis de nos lecteurs sur des sujets d'ordre général. Quoi qu'il en soit, chaque mois le choix des articles est souvent dépendant de l'inspiration des auteurs qui participent à ruedespuces.
Ainsi, dans ce numéro nous proposons 3 sujets se référant au passé : Les commerces de Saint-Martin dans les années 1960, l'histoire du patronage et les modèles d'automobiles des préfets de l'Ardèche au début du siècle dernier, 2 articles d'actualité , l'un traitant du bruit dans nos campagnes et un autre de la perte d'habitants en Ardèche en général et à Saint-Martin en particulier. Enfin un billet d'intérêt national intitulé « Bizarre, bizarre ».
Bonne lecture
François Champelovier
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Le Patronage à Saint-Martin-de-Valamas
Au début, ce fut « la passion du théâtre » (première partie).
« … En ce début de XXème siècle, l’envie nous prie de déployer nos talents sur une scène locale … »
Voilà ce qu’imaginait, peut-être et mieux encore, le curé Méjean installé sur la commune de Saint-Martin de Valamas.
Oui, son idée était d’accompagner les jeunes et les moins jeunes vers des activités culturelles et sportives, de détentes.
Initialement, le curé de la paroisse avait imaginé la construction d’un hôpital, mais la loi de 1905 sur la laïcité l’en dissuada. Il orienta alors son projet vers une activité théâtrale qu’il inscrivit dans le cadre d’un patronage.
Nous sommes en tout début du XXème siècle, un théâtre nait avec la formation d’une troupe d’amateurs, de talents en devenirs, de passionné(e)s.
S’exprimer par la voix, le geste ou le corps, peut-être la meilleure réponse aux bruits des bottes si proches, à cette envie d’en découdre sur la scène d’un théâtre et non d’un champ de bataille.
Cette histoire que je rapporte ici, c’est Pierre qui me l’a racontée, à la maison, en ce mois de janvier froid et ensoleillé, en me livrant des dates, des noms et d’une manière générale l’ambiance de cette époque. Il est venu avec ses notes qu’il place sur la table. Cette histoire est celle d’un bâtiment désigné sous le vocable « le patronage », qui vit défiler toute la jeunesse Saint-Martinoise.
Ainsi, le curé concrétise son projet par l’achat du terrain puis la construction du bâtiment qui se situe au quartier de la Plaine. La rue est encore en terre battue.
Son idée, créer un patronage paroissial. Un lieu où les jeunes du Bourg et ses environs puissent s’exprimer sur une scène théâtrale, dans un groupe musical, ou encore s’exercer à la gymnastique.
En 1900, le terrain est acheté puis suit la construction du bâtiment, qui aura deux niveaux, visible encore aujourd’hui.
La salle de spectacle sera située au niveau de la rue avec une scène placée « côté rue », un niveau intermédiaire reçoit la salle d’habillage, et le bas constituera la salle de gymnastique. Un escalier relie la scène à la salle d’habillage, disparu depuis.
Les spectateurs pénètrent la salle de théâtre ainsi que les comédiens, par des portes dédiées accessibles depuis un balcon latéral au bâtiment.
A chaque représentation, une ouvreuse accueille les spectateurs et les accompagne.
J’image facilement les rideaux fermés avant le début du spectacle, les comédiens s’habillant, alors qu’un brouhaha se répand dans la salle, des chuchotements surgissent par endroits, chacun voulant donner les dernières nouvelles à son voisin. Puis, par surprise, le brigadier frappe les trois coups, arrêtant net tout bruissement, tout chuchotement ; il n’y a pas besoin d’avertir le spectateur d’éteindre son smartphone, non évidemment ! c’est le silence, le public frémit, le rideau s’ouvre. C’est le basculement et l’imaginaire du spectateur se trouve emporté dans un autre monde… c’est le sixième art !
Les jeunes du Bourg participent à cette initiative, tel Marc André qui marque les esprits par son talent d’acteur.
Les pièces de théâtre de cette époque restent à découvrir, je me risque à imaginer « Poil de carottes » de Jules Renard, ou encore « Ubu sur la butte » d’Alfred Jarry. Il semble plus vraisemblable que se jouèrent des scénettes données par les élèves des écoles. En cela, avant-gardiste de l’introduction de l’expression orale dans nos Lycées d’aujourd’hui.
Ainsi, des jeunes revenus du STO organisent à leur tour une représentation théâtrale de leur histoire vécue lors de leur séjour en Allemagne et, également, lorsque les prisonniers de guerre rentrent à la suite de leur libération.
Dans la partie inférieure du bâtiment sur un sol de terre battue, le collectif créé un gymnase. Des barres parallèles sont installées ainsi qu’une corde, un trapèze, des barres fixes. Précurseur en cela de la salle de gymnastique actuelle installée dans les anciens bâtiments Laurent. Une salle moderne avec les accessoires de son époque fonctionne et offre aux jeunes un sport en salle. Ce n’est pas si mal !
A cette époque, des représentations d’exercices de gymnastiques sont donnés, devant un public que l’on peut imaginer impressionné.
Cette première moitié du XXème siècle se déroule avec ses malheurs funestes, ces deux guerres mondiales qui déciment le pays.
Arrive à cette même époque la modernité. Les arts de l’image sont apparus depuis quelques années. La photographie démocratise le portrait au regard de la peinture inaccessible pour une majorité de personne, le cinéma devient lui aussi accessible à tous.
La suite au prochain numéro
Texte et photos : Alain Roméas