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ruedespuces - Page 161

  • Et maintenant, qu'est-ce qu'on fait ? ...

    Réflexion sur la question écologique

    Dans les circonstances inédites que nous traversons, le quotidien de chacun se trouve profondément bouleversé. 

    Nos activités ont été fortement perturbées. Notre liberté de mouvement est contrainte, l’anxiété individuelle et collective s’accroit, chacun se demande de quoi demain sera fait.

    On a souvent entendu – à chaque crise -, que les choses ne seraient plus jamais comme avant et on a vu aussi, souvent et comme fatalement, que bien peu de changements advenaient. 

    Voici quelques réflexions devant cette pandémie qui frappe le monde en essayant de comprendre les circonstances que nous traversons et d’essayer de reconnaître et d’explorer les passages éventuels vers un monde qui serait celui de l’ "Après".



    1. Constats

    NOUS SOMMES DEVANT LE PLUS GRAND DÉFI DE L’HISTOIRE DE L’HUMANITÉ.

    Nous faisons face à une situation sans précédent. L’avenir est en danger. Aucune espèce vivante ne s’était encore comportée comme les humains dans toute l’histoire de la Terre. (Aurélien BARRAU)



    La dernière prévision des Nations Unies sur l’évolution de la population mondiale d’ici la fin du siècle s’élève, en hypothèse moyenne, à 11 milliards d’individus.

    Supposons qu’on retienne l’hypothèse moyenne comme crédible. Passer de 7, 3 milliards à 11 dans l’espace d’une vie humaine constitue un véritable défi pour la planète, d’autant plus difficile à relever que de nombreuses ressources non renouvelables sont en voie d’épuisement. Mais cette approche globale cache un défi beaucoup plus sérieux encore : la croissance n’interviendra que dans une partie seulement du monde.

    Il est difficile d’imaginer que les pays dont la population va ainsi augmenter puissent simultanément résoudre leurs problèmes actuels et faire face à l’explosion démographique et urbaine qui les attend.

    Mouvements sociaux : Amérique latine, Asie, Europe, Moyen-Orient. Les dernières années ont vu la multiplication dans le monde de puissants mouvements de contestation citoyens en cours de développement. Une vague qui vient clore une décennie entamée avec le processus révolutionnaire tunisien, point de départ d’une véritable onde de choc politique qui va atteindre nombre de pays des mondes arabes à partir de 2011 lorsque, dans le même temps, d’autres mouvements socio-politiques contestataires se propageaient en Europe (mouvement des Indignés en Espagne, multiples luttes sociales en Grèce, « Gilets jaunes » en France, etc.) et dans les Amériques 

    Cette nouvelle vague exprime la dénonciation et le rejet de plusieurs phénomènes récurrents, pour certains aggravés depuis le début de la dernière décennie, dont elle souligne par ailleurs les articulations : vie chère, inégalités sociales, politiques d’austérité qui rendent onéreux l’accès à des services publics de base détériorés, corruption endémique, accaparement des institutions par un personnel politique au service de minorités qui défendent leurs privilèges, logiques confessionnelles (Moyen-Orient) et clientélistes de distribution des pouvoirs et des richesses qui renforcent les dynamiques de dépossession.

    Ces mobilisations montrent qu’un volcan bouillonne sous nos pieds. 

    Mouvement écologique :

     L’écologie en tant que mouvement social a émergé il y a une cinquantaine d’années en Europe. Aujourd’hui, les mobilisations et les modes d’engagement ne cessent de se renouveler en faveur de l’écologie. 

    Si ce terme ne constitue pas, à proprement parler, un concept pour la sociologie, il n’en demeure pas moins que la notion à la fois systémique, dynamique et empirique pourrait permettre de dépasser les clivages entre les différentes perspectives traitant des mouvements sociaux dans la littérature sociologique. 

    En effet, la diversité de leurs revendications éclaire les modalités contemporaines de l’engagement (individuel et collectif) dans et pour l’écologie.



    • Protection de l’environnement, promotion des “communs”, critique de la gestion de l’argent public, mais aussi remise en question de l’État centralisateur et autoritaire, rejet du capitalisme… 

    • La variété des trajectoires politiques individuelles et communes dans ces luttes militantes, 

    • La multiplicité des formes d’engagement et des formes de mobilisation (des forums mondiaux aux manifestations nationales et aux résistances quotidiennes), 

    • L’articulation des échelles d’action peuvent être abordées tant à travers les prismes des conflits de classe qu’à partir des théories de l’émancipation. 

    • L’approche en termes de processus de " réforme de soi ", 

    L’activisme écologiste tend à se radicaliser. Nombreux sont les militants qui se regroupent autour du concept de décroissance, qu’ils préfèrent à celui de développement durable. C’est l’idée même de développement avec sa tonalité progressiste qu’ils récusent.

    La croissance rencontrerait sous nos yeux " les limites de la planète ". La décroissance serait un fait. Catastrophes écologiques, épuisement des ressources naturelles et bombe démographique en apporteraient la preuve.



    1. Réflexions



     Plusieurs mouvements sociaux ont rythmé l'année des Gilets Jaunes à la réforme des retraites, en passant par les marches pour le climat, les mouvements de colère dans les hôpitaux ou les manifestations contre la politique du gouvernement et la réforme du statut des fonctionnaires.

    La crise du coronavirus appelle à anticiper davantage les risques à venir, et notamment climatiques. Revoir au plus vite notre modèle de développement est nécessaire pour éviter le pire, sur un plan écologique, mais aussi démocratique.

    Les hypothèses de moindre croissance reposent sur une baisse du taux de fécondité qui s’accélèrerait et sur l’éventualité d’un taux de mortalité qui régresserait moins vite que dans la période récente. Certes, des pandémies et des épidémies, comme celle du sida, du coronavirus ou des conflits pourraient avoir un coût démographique important. Mais des événements aussi catastrophiques que la grippe espagnole (50 millions de morts) et les deux guerres mondiales (respectivement 20 et 60 millions de morts) ne feraient perdre en fin de compte que quelques années de croissance.

    Traditionnellement, les enjeux du développement durable sont répartis en trois catégories. Il y a l’économie, l’environnement, et la société. On dit alors qu’un développement durable est une manière de vivre qui nous permette de concilier à la fois des objectifs de performance économique, des ambitions de protection et de préservation de l’environnement et un développement social commun positif.

    Si cette vision a permis pendant de nombreuses années de penser l’évolution de nos sociétés de façon un peu plus durable, il semble qu’elle ne permette plus aujourd’hui de rendre compte de façon précise et pertinente des enjeux de développement durable auxquels font face les sociétés modernes. Au fur et à mesure que nos connaissances du monde se développent, nous avons pris conscience que ces trois dimensions (économiques, sociales et environnementales) étaient en fait imbriquées en permanence, toujours en interrelation complexe. Ainsi, on sait aujourd’hui que la protection de la planète n’est pas distincte de notre équilibre économique : la performance de nos entreprises et leur capacité à assurer nos besoins dépend directement de notre capacité à préserver les ressources et les écosystèmes. De la même façon, notre environnement influence des aspects sociaux de nos vies, comme la santé, les inégalités ou l’exclusion. La séparation entre l’économique, l’environnemental et le social semble aujourd’hui perdre de son sens.

     Alors, comment comprendre les enjeux du développement durable en allant un peu plus loin que cette typologie ?



    1. Que pourrions-nous faire ?



    La crise sanitaire que nous venons de vivre avec ce coronavirus démontre l’ampleur des transformations que nous allons devoir engager pour faire face au réchauffement climatique. Il faut éviter une relance à l’ancienne qui accroîtrait encore les émissions de CO 2 au détriment du climat, de la justice sociale et de la santé.

    Nous avons vécu comme un passage de cap pour l’humanité confrontée à sa vulnérabilité et à ses limites. Si l’heure est aujourd’hui à l’unité, il va falloir après réfléchir à l’absurdité d’une globalisation effrénée qui a fait de la circulation à flux tendu des biens un dogme. Il faut aller vers une forme de relocalisation qui ne se confond ni avec le protectionnisme ni avec le nationalisme. Nous avons reçu une forme d’ultimatum de la nature. 

    Saurons-nous l’entendre ? 

    Les mots – croissance, concurrence, compétitivité, mondialisation, globalisation, ne font plus envie.

    Peut-être faudrait-il les remplacer par entraide, relocalisation, consommer moins et répartir mieux.

    Peut-on rêver d’une nouvelle société d’entraide et d’auto-organisation, basée sur l’autonomie alimentaire à l’échelon local…

    Aujourd’hui, partout dans le monde, les sociétés sont face à un défi de taille : repenser leur modèle afin de construire les bases d’un avenir plus durable, plus positif, plus juste. Le développement durable est au cœur des réflexions, dans tous les domaines. On essaie de produire des énergies plus propres, plus respectueuses de l’environnement, de penser des moyens de se déplacer plus efficients mais qui détruisent moins la planète et soient plus accessibles à tous. On tente de définir de nouveaux modèles économiques, avec une répartition plus juste des richesses, de prévenir et de lutter contre l’exclusion, la pauvreté, le mal-être. On innove, on invente, des technologies ou des façons de vivre ensemble qui remettent en cause nos conceptions habituelles du quotidien, du travail des loisirs. Bref, les sociétés sont en train de se réinventer, ou en tout cas, elles sont contraintes de le faire face aux menaces que représentent la crise écologique, le changement climatique ou encore les transformations des aspirations citoyennes et démocratiques.

    Tous ces défis font partie de ce que l’on pourrait appeler les enjeux du développement durable. Les comprendre, les analyser, les étudier, c’est se donner les moyens de trouver des solutions et des aménagements pour construire un monde plus durable, plus juste, plus sain. Quels sont ces enjeux ? Quels en sont les tenants et les aboutissants ? Comment comprendre leur complexité, les phénomènes qu’ils recouvrent ?

    Une liste des enjeux et de réflexions du développement durable pourrait être détaillée.

    Parmi ces enjeux, voici sans doute les plus importants :

    • Changements climatiques et atmosphériques

    • Biodiversité et écosystèmes

    • Transition énergétique

    • Bien-être et qualité de vie

    • Égalité et droits humains

    • Lutte contre la pauvreté et l’exclusion

    • Répartition des richesses

    • Réduction des déchets et des gaspillages…
      Auteur de cette analyse :  Jean-Guy GANSOINAT       (Juin 2021)

  • Excursion ou expédition ?

    L’excursion du Club alpin français au Mézenc (ruedespuces n° 30) était savamment préparée et un article du Journal d’Annonay du 30 juillet 1881 donnait quelques détails pratiques pour ceux qui y participeraient. Les deux caravanes de l’excursion étaient « annoncées comme devant être nombreuses » mais ne comportaient probablement pas de femmes.

    Même si le Club avait annoncé, dès le début, sa volonté d’intégrer les femmes, elles ne représentaient que 1% en 1876. Le club de Haute Tarentaise, par exemple, n’a accepté l’adhésion d’une femme qu’en 1883. A signaler que George Sand signe un article, « Souvenir d’Auvergne », dans le premier annuaire publié par le Club alpin français, en 1874. Elle a été membre du club, avec son fils, jusqu’à sa mort en 1876.

    Des préconisations ont parues dans le même journal :

    Les membres devront être « munis de leur insigne d’alpiniste » pendant toute la durée de l’excursion. Les cartes d’état-major à utiliser sont précisées et il est aussi proposé de consulter le guide Joanne France-Auvergne-Morvan-Velay-Cévennes.

    Il est aussi conseillé de ne prendre « que le strict nécessaire pour la durée de l’excursion en fait de bagages, afin de ne pas trop charger les voitures et de faciliter les mouvements des caravanes. Un pardessus, ou un plaid imperméable sont nécessaires pour cette excursion dans laquelle ont peut être surpris par les orages et les changements brusques de température ».

    Un équipement scientifique des excursionnistes était possible : « Le thermomètre fronde (Il était fixé à une chaînette que l'on faisait tourner comme une fronde pour obtenir une mesure plus fiable de la température de l'air), le baromètre orométrique (baromètre à cadran et de poche), le podomètre et la boussole peuvent être utilisés pour des observations diverses. »

    Le guide Joanne conseillait les voyageurs sur leur garde robe :  « Pour les vêtements de voyage, la laine est de beaucoup préférable à la toile ; le coutil devient froid quand on a transpiré ou quand on a été mouillé. Avec des chaussettes de laine on n'a jamais d'ampoules. Chacun s'habille à sa guise ; mais de bons souliers, à la semelle épaisse, et garnis de gros clous, sont indispensables pour la marche. »

    Cette excursion que l’on pourrait presque associer à un trek, compte tenu de son organisation et du chronométrage de ses parcours, se doublait donc d’une approche scientifique. Aujourd’hui le randonneur, ou le touriste, est probablement moins scientifique mais une profusion d’« applis » sur son téléphone portable lui permet de mesurer ce qu’il veut, si l’envie lui prend, avec plus ou moins de précision.

    Mais, à part les excursions, quel était l’emploi du temps d’un touriste ?

    Avant toute chose, la première préoccupation du touriste, quelle que soit l’époque, est de savoir où il va et comment. Il consulte donc probablement un guide touristique.

    A suivre…

    Jean-Claude Ribeyre

     

    1- Un excursionniste devant le Gerbier. Extrait d'une carte postale des éditions E.T. d’Aubenas, bromure Artige. Il existe plusieurs cartes postales mettant en scène le même personnage dans des situations différentes.

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    2 - Affiche publicitaire  « Articles de voyage du touriste ». Émile Lévy éditeur, 1880. Bnf Gallica. Pour comparer avec aujourd’hui : https://www.globe-trotting.com/accessoires-de-voyage.

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  • Et si le monde de demain n’était pas du tout à la hauteur de nos espérances ?

    « L’espérance est une vertu héroïque. On croit qu’il est facile d’espérer. Mais n’espèrent que ceux qui ont eu le courage de désespérer des illusions et des mensonges où ils trouvaient une sécurité qu’ils prenaient faussement pour de l’espérance. »

                                                               Bernanos - La Liberté pour quoi faire ?bernanos.jpg

     

    Episode 6 de la Mosaïque du fou

     

    CHAPITRE 3- Momo

     

    Momo était inquiet, cela faisait bien trop longtemps qu’aucune équipe était partie dans les hautes Boutières soit en expédition punitive soit en mission de reconnaissance. La mission partie à la recherche de cette trainée de Leylla qui avait abandonné la foi de ses ancêtres pour vivre avec un Français catho & intello et qui n’était jamais revenue avait marqué un tournant dans son groupe armé.

    L’influence, ou devrions nous dire la main mise, des Bataillons comme ils s’appellent, sur les hautes Boutières pose un certain nombre de problèmes de ruptures d’approvisionnement et de communication. Momo sait bien qu’un jour ou l’autre il devra se réunir avec d’autres Katibas pour y mettre fin. Il sait aussi, d’expérience, que dans ce genre de situation la précipitation n’est jamais bonne conseillère, et les Katiba de la basse vallée de l’Eyrieux qui ont voulu y aller seules, ont appris à leur dépend que ces apostats savent se battre et qu’ils sont bien équipés et organisés.

    Momo est né en Irak en 2013, d’un père Jihadiste français parti se battre en Irak deux ans avant la proclamation du Califat par Daech et d’une mère Française Catholique convertie qui a suivi son barbu de père par amour, après s’être convertie au grand damne de sa famille. Son père avait un parcours de guerrier de l’Islam. Il avait été formé et avait combattu en Afghanistan au côté de Oussama Bin Laden, à cette époque il faisait partie intégrante de l’internationale Djihadiste. Il se battait là ou la politique des groupes armés l’envoyait, d’Afghanistan en Algérie en passant par des périodes de repos et de prière en Arabie Saoudite. Il aurait pu devenir un des bras droits des leaders du mouvement, mais il avait la mauvaise nationalité. Il avait vite compris qu’on appréciait son ardeur au combat, sa foi dans Allah sa connaissance plus que correcte de la langue arabe parlée mais aussi écrite, mais il n’était pas originaire ni du bon pays, ni de la bonne ethnie. Un peu comme dans la Légion étrangère, il pouvait devenir un sous-officier avec beaucoup de responsabilité et de médailles, mais il ne pénétrerait jamais le cercle fermé des officiers, et encore moins des organes de commandement. C’est ce qui l’avait convaincu de revenir en France et d’essayer de se faire oublier au fin fond du 9 trois. Il y rencontra Myriam qui se converti et devint dans le plus grand secret Mariam. Quand les évènements en Irak, suivant la deuxième guerre du golfe, commencèrent, plusieurs de ses anciens compagnons vinrent le chercher et la promesse d’y créer un nouveau Califat, géré suivant toutes les règles de la Charia le séduisit et il partit avec armes et bagages et avec son épouse. La guerre dura longtemps en 2013 il eut un premier fils puis eu deux filles et un deuxième fils en l’espace de trois ans. Il mourut au combat à Falloujah en 2016, Mariam était enceinte de son 4eme enfant. Les Forces Kurdes les firent prisonniers et les internèrent dans un camp. L’état Français refusa de les reprendre et les laissa pourrir dans ce camp, une prison de tentes. Momo parle peu de sa tendre enfance, qui n’avait de tendre que le nom. On sait seulement que son petit frère n’y survécu pas et mourut de dysenterie à 6 mois. Sa mère mourut 4 mois plus tard et on ne saura jamais si c’était de chagrin ou de maltraitance par les gardiens. Peut-être qu’elle est morte de maladie, car aucun médicament n’était disponible dans cette prison, et la moindre infection pouvait être fatale. Momo aurait pu s’enfuir mais il se sentait responsable de ses jeunes sœurs. Dans ces camps la solidarité n’était pas un vain mot et la charité, 4eme pilier de l’Islam (zakât), signifiait qu’on partageait tout y compris ce qui manquait terriblement. Dans ce camp il y avait de nombreuses familles mono parentales, les hommes ayant été tués au combat ou mis dans des prisons plus traditionnelles en attente de leur exécution ou du retour au pays d’origine. 4 ans plus tard en 2021 à l’âge de 7 ans, sachant ses sœurs en de bonnes mains, chez les voisines de tente, Momo décida de se venger et de venger sa mère. Il s’évada et pris la direction du Nord-Ouest pour rejoindre la terre de ses ancêtres français. Depuis leur internement sa mère lui avait parlé de sa grand-mère française qui viendrait les chercher pour les ramener au pays, mais qui ne vint jamais. Le voyage fut très long et périlleux, mais la misère dans les pays traversés était une forme de protection. Momo savait se débrouiller, vivre sur les poubelles des autres et passer totalement inaperçu. Au camp il avait vite compris que les hommes, enfin certains, s’intéressent plus aux petits garçons qu’aux femmes, et que s’il s’y prenait bien il pourrait en tirer un bénéfice financier. Son voyage fut fait de rapines, de prostitution, de charité mais aussi de coups, de viols et de famines. Il réussit finalement à s’embarquer à bord d’un bateau de fortune sur la cote tunisienne en direction de Lampedusa. La traversée qui apparaissait courte sur une carte fut longue et pénible. Le dicton que l’homme est un loup pour l’homme prend toute sa dimension dans ces circonstances. Il a fallu se battre pour arriver à monter dans l’embarcation. Momo convoitait la même place qu’un garçon de 14 ans beaucoup plus costaud que lui. La bagarre fut acharnée sous les rires, quolibets et encouragements des passeurs. A un moment le regard de Momo plongea dans celui de son opposant et Momo vit de la peur. Cela le galvanisa et il essaya d’arracher la carotide du garçon avec ses dents. Devant un tel acharnement le silence s’était fait et ce garçon, dont il ne connaitrait jamais le nom, se retira en courant. La traversée ne fut pas une partie de plaisir, il y avait gros temps, il faisait froid, et il ne fallait pas se faire prendre par les gardes cotes tunisiens, libyens, ou les navires de la force Frontex censés protéger les rivages européens. Ils naviguèrent trois jours et trois nuits, après 24heures ils n’avaient plus rien à manger et après encore une journée plus rien à boire. Les vieillards et les enfants en bas âge moururent en premier, ils furent jetés par-dessus bord. Un bon tiers d’entre eux étaient déjà morts quand l’OCEAN Viking, navire d’une association caritative les récupéra. Ils se pensaient sauvés, mais le bateau ne fut pas autorisé à accoster et une longue attente commença en pleine mer. Ils durent même remplir les réservoirs auprès d’un navire ravitailleur de l’armée française le Var. C’est à cette occasion que Momo qui parlait quelques mots de la langue de Molière put expliquer qu’il était français montrant comme preuve le passeport de sa mère qui ne l’avait pas quitté depuis les camps. C’est ainsi que Momo arriva tout d’abord en Corse puis à Toulon.

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    suite au prochain numéro

     

    Louis Lévêque