Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

ruedespuces - Page 173

  • ruedespuces N° 23

    Octobre 2020

  • Editorial

    Rochebonne, le 12 octobre, 9h du matin : Pour illustrer un article de ce blog « Critique, critique » je suis monté au château faire des photos. Le thermomètre indique 5°, le soleil alterne avec une petite bruine rafraîchissante, les roches des Cuzets sont blanches, les nuages cachent par moments le Mézenc, un rayon de soleil illumine furtivement Saint-Martin, les premières couleurs d'automne apparaissent, le calme est total. Le contraste avec les nouvelles que j'ai entendues à la radio avant de partir est frappant : Crise sanitaire, crise économique, crise sociale, conflits, élections aux USA etc... Dois-je redescendre ? D'autant plus que même à Saint-Martin s'installe semble t-il un climat d'incivilité. (voir l'article « Qu'est-ce que ce malaise au centre du monde. » ).

    Dans le numéro précédent, la question suivante : « Le bonheur est-il une question d'argent ? » était posée. Ne pourrait-on pas également se demander si le bonheur est lié aux progrès techniques ? Pour essayer d'apporter une réponse un article de ce mois d'octobre nous décrit la vie de nos villages dans les années 50/60 sans eau courante et bien sûr sans machine à laver alors qu'un autre se demande si le progrès n'a pas atteint ses limites, s' il nous a amené plus de bonheur et si l'invention de l'internet qui nous permet par exemple d'échanger par l'intermédiaire de ce blog ne suffit pas à notre bonheur ou s'il faut que ce soient bientôt les machines qui dirigent nos vies.

    On trouvera également dans ce numéro le bilan de la saison touristique, l'interview d'un psychologue en EHPAD, une recette de bombine, des adjectifs dérivés de l'antiquité, un livre qui parle des maires au bord de la crise, le programme de l'Université Populaire des Boutières et quelques citations.

    Bonne lecture,

    Et n'oubliez pas de nous envoyer vos commentaires.

    François

  • Je vous parle d'un temps...

    Les jeunes générations d'aujourd'hui (nous dirons ceux nés après 1970) ont connu (certes à des degrés divers) depuis leur naissance le confort moderne : Electricité, eau courante à la maison, chauffage électrique, véhicules automobiles, plus récemment téléphone portable et ordinateur...

    Pourtant, elles doivent savoir qu'il n'en a pas toujours été ainsi, loin de là et que le temps où ces objets aujourd'hui banals n'existaient pas n'est pas si éloigné que cela : Dans les années 1950/1965 par exemple, pour rester dans une période durant laquelle sont nés ou ont grandi certains des vivants d'aujourd'hui. C'était par exemple le cas à Saint-Martin-de-Valamas et les campagnes environnantes. Alors, pour tous ceux qui n'ont pas vécu cette époque, remontons un peu le temps, vers les années 1950, pour voir ce qu'il en était des conditions de vie d'alors.

    • I ) L'accès à l'eau : De nos jours, si vous avez envie de boire un pastis, de vous laver les mains, de prendre une douche, vous tournez le robinet, et hop ! L'affaire est faite. Mais cela n'a pas toujours été aussi facile. Si avant 1960 quelques chanceux ou privilégiés avaient l'eau à la maison, notamment dans le centre du village, ce n'était pas le cas de la majorité des habitants de la commune ; il fallait aller chercher l'eau à la pompe du quartier, à la fontaine ou à la source pour les hameaux et fermes isolées. Cela donnait l'occasion de papoter avec les voisins et parfois de quelques bisbilles pour des questions de préséances ! Evidemment, sans eau courante, inutile de parler de salle de bain, de WC à l'anglaise et encore moins de lave linge ! Mais, direz-vous, comment faisions nous alors ? Nous faisions avec, et au mieux : La lessive se faisait au lavoir, au bassin ou encore à l'aide d'une lessiveuse dans laquelle il fallait faire bouillir l'eau. Et pour les besoins, alors ? Il y avait le traditionnel « pot de chambre » qu'il fallait vider tous les matins, les toilettes publiques pour ceux qui étaient proches, exceptionnelllement un endroit d'aisances dans les constructions les plus récentes (mais sans chasse d'eau, un seau en faisait office.) ou encore la fameuse cabane au fond du jardin qui, notamment en hiver, n'incitait pas à entreprendre la lecture des « Trois Mousquetaires » ! Quant à la toilette, elle se faisait le plus souvent à l'eau froide, et il fallait ramener l'eau dans un baquet pour une toilette complète. L'avantage de tout cela, c'était que l'eau était gratuite. Hé oui, c'était ça la vie dans nos régions. Le grand changement eut lieu dans les années 55/60 avec la généralisation du raccordement au réseau public et l'installation de l'eau courante dans l'ensemble de la commune (au moins pour le bourg) Une véritable révolution ! Finies les corvées d'eau, enfin le confort (quasiment le luxe) des toilettes hygiéniques, des douches bienfaisantes (même si tous les logements n'en étaient pas encore pourvus) les lessives un peu moins pénibles (le lave-linge attendra encore un peu). Mais ce n'était pas seulement l'accès à l'eau qui était différent d'aujourd'hui. Oh ! Que non ! On peut parler des transports, des moyens d'information et de communication, du chauffage... Oyez donc jeunes gens !

    • II) Le chauffage : Il va sans dire que l'isolation des logements était alors rudimentaire, mais ce n'était pas là la principale différence d'avec aujourd'hui. Non, cette différence tenait d'abord dans les matériaux utilisés pour le chauffage : Les deux principaux étaient le bois et le charbon, celui-ci était fourni par les mines françaises (Nord, Loire, Cévennes …) de façon conséquente. A noter qu'il fallait procéder à l'allumage du fourneau tous les matins à l'aide de petit bois, de genêts secs, de « babets » (pommes de pin). En hiver toutes les cheminées fumaient. Le fuel commençait à être utilisé, mais le chauffage électrique n'est vraiment apparu qu'après 1980. Alors pensez-y quand vous appuyez sur un bouton pour lancer le chauffage chez vous. Autrefois ce n'était pas si facile !

     

    • III) Les déplacements et les transports : Bien sûr l'automobile était déjà présente vers 1950 à St-Martin. Elle est même certainement apparue dans nos contrées avant la première guerre mondiale, même si c'était quelques unités seulement. Après la guerre de 39/45, elle s'est diffusée plus largement. Néanmoins, seuls quelques ménages en étaient équipés ; il ne devait y avoir alors que quelques dizaines d'automobiles (en comptant large) appartenant surtout à des commerçants, artisans, chefs d'entreprise, médecins, notables divers... Mais alors comment faisaient les autres ? Tout d'abord, il faut savoir que les déplacements à longue distance étaient beaucoup moins fréquents qu'aujourd'hui ; on travaillait dans les entreprises du village, on achetait la plupart des produits dans les commerces locaux, tous les types de commerce étaient alors présents (Alimentations bien sûr ; 5,6,7,8 épiceries ?, habillement, mobilier, quincaillerie, droguerie, etc...) . La plupart des déplacements se faisaient tout simplement à pied ou à la rigueur en bicyclette (la mode du vélo loisir n'était pas encore née) et parfois le vélomoteur (la célèbre « mobylette » ou « mob »)et le scooter (la Vespa) et encore avec la charrette tirée par le cheval ou l'âne. Il existait également des services réguliers d'autocar vers quelques villages environnants (Notamment vers Arcens, St-Martial, Borée...) et bien sûr les chemins de fer, car oui, (pour ceux qui l'ignoreraient encore) le train passait à St-Martin depuis 1903, sur ce qui constitue à présent la « Dolce Via », la gare était sise à l'emplacement du lotissement actuel au dessous de l'EHPAD. Cette voie ferrée transportait les voyageurs dans des autorails appelés « Michelines » vers le Cheylard, la Voulte, Lamastre, Tournon, St-Agrève et la Haute-Loire. Nombreux furent les élèves (dont l'auteur de ces lignes a fait partie) pensionnaires dans les collèges du Cheylard (et parfois à Tournon) qui l'empruntaient le lundi matin (et le samedi midi pour le retour) ; hé oui, il n'y avait pas d'autocar les ramenant les soirs à la maison ! Ce n'est qu'au cours des années 60 et 70 que la voiture s'est généralisée comme moyen de transport quotidien. (Pour l'histoire du CFD, voir l'ouvrage de Roger Dugua « Trains à vapeur et autorails en Ardèche et Haute-Loire ».

    • IV) L'information et les communications : L'information passait essentiellement par la presse écrite et par la radio, déjà fort répandue à l'époque. Mais attention ! Ce n'était pas encore le transistor (arrivé dans les années 60) mais le bon vieux gros poste installé dans la cuisine ou le salon ! Hormis cela, les téléviseurs étaient  rarissimes dans les années 50 ; peut-être une dizaine ou une vingtaine, chez les ménages les plus aisés. Et c'était en noir et blanc, et il n'y avait qu'une chaîne, et elle n'émettait que quelques heures par jour (à midi et le soir après 19 ou 20 h !) ; c'est dire le chemin parcouru en 60 ans ! Mais ceux qui possédaient un téléviseur invitaient le soir les amis et les voisins à venir regarder les programmes avec eux... Quant aux communications personnelles, si le téléphone était utilisé, il n'était en réalité présent que chez quelques commerçants, entreprises, professions spécifiques (médecins, pharmacie...). Ceux qui le possédaient acceptaient bien souvent, de laisser leurs voisins l'utiliser (et c'était parfois long et compliqué pour avoir la communication. Sinon on avait toujours la ressource de la missive écrite ou en cas d'urgence des télégrammes laconiques (parce que onéreux). Mais pouvoir correspondre comme aujourd'hui de n'importe où vers quel point de la planète (par portable ou internet) relevait alors de l'anticipation la plus débridée... Pour être tout à fait complet, et faire couleur locale, l'information municipale était colportée par le garde champêtre (ou de ville) qui, doté d'un tambour, parcourait les rues en clamant ses « avis à la population ».

    • V) Les déchets et les ordures ménagères : Ce qu'il faut d'abord savoir, c'est que le volume des ordures ménagères était beaucoup moins important à cette époque que de nos jours, et qu'elles n'étaient pas constituées des mêmes matériaux ; le plastique notamment, aujourd'hui envahissant, n'était guère utilisé. Le verre, employé pour les boissons était récupéré car consigné. Lors des livraisons à domicile (vin, eau minérale) les bouteilles vides étaient reprises contre des bouteilles pleines. En fait, les déchets ultimes étaient souvent d'origine organique (restes de viande ou de végétaux) ; une partie était réutilisée pour le compost ou allait nourrir les animaux de la ferme. Donc point de conteneurs spécialisés comme à présent ; un simple bac en tôle faisait l'affaire et une personne dotée d'un cheval attelé à un tombereau s'occupait du ramassage hebdomadaire ou bihebdomadaire, avant de verser le contenu de son attelage dans la rivière, d'abord près du confluent Eysse/Eyrieux, puis un peu plus tard, légèrement en amont de Taussac, toujours dans l'Eyrieux. Les préoccupations environnementales n'avaient pas encore vu le jour, mais certains déchets avaient la vertu de nourrir les poissons.

    • Conclusion : Ce tableau sommaire (des années 50/65) des aspects les plus sensibles de la vie quotidienne à St-Martin (mais celle des autres bourgs et villages de la région était fort semblable ) montre l'écart immense qui s'est creusé en soixante années. D'aucuns disent « c'était mieux avant » Pourtant il semble bien incontestable que les progrès scientifiques et les inventions techniques ont fortement amélioré les conditions de vie des habitants. Peut-être y a-t-on perdu une certaine sérénité, une façon de vivre plus conviviale, plus chaleureuse. Chacun jugera. Mais il est bon de se souvenir. Puissent ces quelques lignes qui précèdent offrir aux plus jeunes l'occasion de mieux connaître un passé qui survit toujours dans notre présent. C'est là toute leur modeste contribution.

      Gilbert